Profession Juridique

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Commissaires de justice : ne pas se contenter de l’avis du voisin

Mandaté pour signifier un jugement à un locataire en conflit avec son bailleur, un commissaire de justice s’était rendu à son domicile. En l’absence de ce dernier, étant dans l’impossibilité de lui notifier l’acte en main propre, il avait procédé à une notification à domicile après s’être assuré, auprès d’un voisin, que le destinataire habitait bien à l’adresse indiquée. Par la suite, le locataire avait fait appel du jugement, mais hors délai selon le bailleur, compte tenu de la date de signification. Une situation contestée par le locataire au motif que la signification à domicile du commissaire de justice n’était pas valable.

Un manque de diligence

Une analyse confirmée par les juges qui ont rappelé que le Code de procédure civile prévoit que lorsque la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré à domicile. Mais que dans cette hypothèse, le commissaire de justice doit effectuer des vérifications pour s’assurer que le destinataire de l’acte demeure bien à l’adresse indiquée. Et que dans le cas présent, se contenter d’une confirmation par un voisin sans effectuer d’autres recherches n’était pas suffisant. La signification réalisée par le commissaire de justice n’était donc pas valable.


Cassation civile 2e, 12 janvier 2023, n° 21-17842

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Notaires : communication de l’adresse d’un client

C’est la loi : les notaires ne peuvent, sans une ordonnance du président du tribunal judiciaire, délivrer expédition ni donner connaissance des actes à d’autres personnes qu’aux personnes intéressées en nom direct, aux héritiers ou aux ayants droit, à peine de dommages-intérêts et d’une amende.

En l’absence d’une ordonnance du président du tribunal judiciaire, un notaire n’a donc pas à divulguer l’adresse d’un de ses clients à un créancier de ce dernier.

C’est ce que la Cour de cassation a affirmé dans l’affaire récente suivante. La vente d’un bien immobilier avait été déclarée caduque par un jugement qui avait également condamné l’acquéreur à payer diverses sommes au vendeur. Mais ce dernier n’était pas parvenu à percevoir ces sommes car l’acquéreur avait déménagé sans faire connaître sa nouvelle adresse. L’huissier missionné par le vendeur avait alors demandé au notaire de lui communiquer cette adresse. Le notaire ayant refusé, le vendeur avait agi contre lui en justice en lui reprochant de faire obstruction à l’exécution d’une décision de justice.

Pas d’ordonnance du président du tribunal judiciaire

Les juges du fond avaient donné gain de cause au vendeur. Pour eux, le secret professionnel qui s’impose au notaire ne saurait, sauf circonstances particulières, dispenser ce dernier de révéler à l’autorité judiciaire qui l’en requiert l’adresse d’un client lorsque ce renseignement est indispensable à l’exécution d’une décision de justice. En outre, dans cette affaire, le notaire n’avait opposé aucune cause légitime susceptible de justifier son refus.

Mais la Cour de cassation a censuré cette décision. Rappelant la loi citée ci-dessus, elle a constaté qu’aucune ordonnance du président du tribunal judiciaire n’avait délié ce notaire du secret professionnel auquel il est astreint. Ce dernier avait donc bien fait de refuser de communiquer la nouvelle adresse de son client.


Cassation civile 1re, 11 janvier 2023, n° 20-23679

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Avocats : estimation des honoraires dans le contrat

Dans une affaire récente, un consommateur lituanien avait signé plusieurs contrats de prestation de services avec un avocat portant sur la gestion d’une copropriété, le versement de pensions alimentaires et dans le cadre d’une procédure de divorce. Dans chacun des contrats, l’avocat s’engageait, notamment, à fournir des consultations juridiques, à préparer les actes et à représenter son client en contrepartie d’honoraires fixés à 100 € de l’heure et du versement d’une avance. L’ensemble des honoraires réclamés par l’avocat n’ayant pas été versés par son client au motif qu’il les jugeait abusifs, la justice lituanienne avait été saisie, conduisant la cour suprême de ce pays à saisir la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre d’un renvoi préjudiciel.

Une clause tarifaire claire et compréhensible

C’est sur le terrain des clauses abusives que la CJUE a été saisie. Et notamment sur l’article 4-2 de la directive 93/13 qui précise que « l’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ».

Or, concernant cette condition, les juges ont répondu à la justice lituanienne que « ne répond pas à l’exigence de rédaction claire et compréhensible, au sens de cette disposition, une clause d’un contrat de prestation de services juridiques conclu entre un avocat et un consommateur qui fixe le prix de ces services selon le principe du tarif horaire sans que soient communiquées au consommateur, avant la conclusion du contrat, des informations qui lui permettent de prendre sa décision avec prudence et en toute connaissance des conséquences économiques qu’entraîne la conclusion de ce contrat ». Une telle clause tarifaire pourrait donc être considérée comme abusive par le droit européen.


CJUE du 12 janvier 2023, n° C 395/21

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Notaires : incitation à la reconstitution des titres de propriété foncière

Comme chaque année, la loi de finances pour 2023 apporte son lot de nouveautés. Deux mesures figurant dans cette loi visent directement l’exercice de la profession notariale.

La première concerne la Corse. Ce territoire souffre d’un désordre foncier qui rend les opérations de transmission parfois complexes. Dans le but d’encourager les habitants de l’île de Beauté à reconstituer les titres de propriété, les pouvoirs publics ont décidé d’exonérer de la taxe de publicité foncière les actes notariés de notoriété acquisitive portant sur les biens immobiliers situés en Corse. Une exonération qui s’applique aux actes de notoriété établis et publiés à compter du 1er janvier 2023.

La seconde mesure concerne le territoire de Mayotte. Là encore, afin de remettre de l’ordre dans le fichier immobilier, la loi de finances pour 2023 exonère de frais d’inscription au livre foncier de Mayotte les actes de notoriété acquisitive portant sur des biens immobiliers sans titre de propriété. Cette exonération est applicable aux actes de notoriété déposés depuis le 6 octobre 2022.


Articles 27 et 66, loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022, JO du 31

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Greffiers des tribunaux de commerce : lutte contre la fraude sociale

Le gouvernement entend renforcer la lutte contre la fraude aux cotisations et aux prestations sociales (travail illégal, perception indue d’allocations d’activité partielle ou de prestations…). À ce titre, il souhaite notamment améliorer la transmission d’informations suspectes entre les différents acteurs de cette lutte.

Dans cette optique, les greffiers des tribunaux de commerce peuvent désormais communiquer, à titre gratuit, aux agents des organismes gouvernementaux (Urssaf, Mutualité sociale agricole, inspection du travail, Pôle emploi, CPAM, etc.) tout renseignement et tout document recueillis à l’occasion de l’exercice de leurs missions et de nature à faire présumer une fraude commise en matière sociale ou une manœuvre quelconque ayant eu pour objet ou pour résultat de frauder ou de compromettre le recouvrement des cotisations et contributions sociales (remise de faux documents, changements fréquents de siège social ou de gérants sur de courtes périodes, cession de parts sociales multiples avant une liquidation judiciaire…).

Selon l’étude d’impact du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, cette mesure vise, entre autres, à identifier plus rapidement les manœuvres frauduleuses perpétrées via des « sociétés éphémères », c’est-à-dire des sociétés fictives créées pour commettre des fraudes aux finances publiques (déclaration de faux accidents du travail pour percevoir les indemnités journalières de l’Assurance maladie, déclaration de salariés fictifs pour percevoir indûment des allocations chômage, etc.).


Art. 98, loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022, JO du 24

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Avocats : secret professionnel des correspondances

Les correspondances entre avocats ou entre un avocat et son client sont couvertes par le secret professionnel, sauf lorsqu’elles portent la mention « officiel ». Dès lors, elles ne peuvent pas être produites en justice.

C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans une affaire récente.

Dans cette affaire, une société avait produit, dans le cadre d’un procès, un document qu’elle avait obtenu par courriel de son avocat, qui lui-même l’avait reçu du cabinet d’un confrère. La société avait estimé que cette correspondance n’était pas couverte par le secret professionnel dans la mesure où elle n’avait pas été échangée entre avocats mais entre un avocat et la secrétaire d’un avocat. En outre, elle avait considéré qu’en sa qualité de cliente, et non d’avocat, elle n’était pas tenue par le secret professionnel et qu’elle pouvait donc verser le document considéré à la procédure.

Des arguments qui ont été rejetés par la Cour de cassation. En effet, les juges ont constaté que le courriel envoyé par l’avocat à la société mentionnait expressément le nom des parties et du dossier concerné ainsi que la nature de la pièce jointe, à savoir un protocole d’accord transactionnel, sans indiquer le caractère « officiel » de cet envoi. Pour les juges, le courriel et ses pièces jointes étaient donc couverts par le secret professionnel. Par conséquent, ils ne pouvaient pas être produits en justice, peu importe, selon les juges, les conditions de leur transmission (transmission par la secrétaire de l’avocat) et l’auteur de leur production en justice (la société cliente de l’avocat).


Cassation commerciale, 16 novembre 2022, n° 21-17338

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Notaires : délai de recours contre une décision disciplinaire

L’appel d’un jugement rendu en matière disciplinaire à l’encontre d’un notaire doit être formé dans le délai d’un mois. Sachant que ce délai court à compter du jour de la décision lorsqu’elle est rendue en présence de l’intéressé ou de son défenseur, et, dans le cas contraire, à compter du jour de la notification qui lui en est faite.

À ce titre, dans une affaire récente, un notaire ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire prononcée par le tribunal en sa présence avait fait appel de cette décision plus de deux mois après qu’elle avait été rendue. Ce recours avait donc été déclaré irrecevable car trop tardif. Mais le notaire avait contesté cette décision, en faisant valoir que le délai pour faire appel n’avait pas pu commencer à courir puisque le délai et les modalités du recours n’avaient pas été portés à sa connaissance ni lors de l’audience ni par voie de notification.

Un professionnel du droit censé connaître le délai pour faire appel

Mais les juges n’ont pas été sensibles à cette argumentation. En effet, pour eux, l’absence d’information dont se plaignait le notaire quant aux voies et délais de recours applicables à la décision rendue à son encontre « ne constituait pas une atteinte disproportionnée à son droit d’accès au juge et à un recours effectif dès lors qu’il est un professionnel du droit en mesure d’accomplir les actes de la procédure d’appel dans les formes et délais requis par la réglementation propre à la discipline de sa profession ».

Autrement dit, en sa qualité de professionnel du droit, ce notaire était censé connaître le délai dont il disposait pour faire appel de la décision disciplinaire rendue à son encontre, en l’occurrence un mois à compter du jour de l’audience à laquelle il était présent. En ayant agi plus de deux mois après, son recours était bel et bien trop tardif.


Cassation civile 1re, 28 septembre 2022, n° 20-18675

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Avocats : clauses abusives dans une convention d’honoraires

Dans une affaire récente, une personne avait confié la défense de ses intérêts à un avocat pour l’assister dans une procédure l’opposant à son époux. Une convention d’honoraires avait été conclue, laquelle prévoyait un forfait, non remboursable, de 3 500 € en cas de dessaisissement de l’avocat par le client ainsi qu’une clause d’indemnité de dédit stipulant que, dans la même hypothèse, l’honoraire restant à courir serait dû (plafonné à 3 000 €). Un an et demi plus tard, la cliente avait mis fin au mandat qui la liait à l’avocat. Par la suite, elle avait saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris d’une contestation d’honoraires afin d’obtenir le remboursement des honoraires versés.

Saisie du litige, la Cour d’appel de Paris avait considéré que les clauses de dédit insérées dans la convention d’honoraires étaient abusives et devaient être considérées comme non écrites. Et donc que l’avocat devait rembourser en partie la cliente des sommes indûment perçues.

S’opposant à cette décision, l’avocat avait formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Un déséquilibre entre les droits et obligations des parties

Les juges de la Cour de cassation ont d’abord rappelé que selon l’article L 212-1 du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. En outre, ils ont souligné qu’un premier président de cour d’appel, statuant en matière de fixation des honoraires d’avocat, a bien le pouvoir d’examiner le caractère abusif des clauses des conventions d’honoraires lorsque le client de l’avocat est un non-professionnel ou un consommateur. Enfin, ils ont estimé que les dispositions du Code de la consommation sont applicables aux conventions d’honoraires d’avocats.

Ensuite, en examinant la convention d’honoraires, les juges de la Cour de cassation ont relevé un déséquilibre entre les droits et les obligations des parties au contrat. En effet, concrètement, l’avocat pouvait obtenir de sa cliente le paiement de la totalité des honoraires ou de leur quasi-totalité alors qu’il n’avait effectué que 2 prestations sur les 6 qu’il s’était engagé à réaliser pour le montant forfaitaire fixé, les deux montants du dédit apparaissant disproportionnés. En outre, il n’était pas prévu dans la convention d’honoraires, une clause de dédit en faveur de la cliente en cas de « dessaisissement » anticipé par l’avocat. Pour ces raisons, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de l’avocat et a confirmé le remboursement partiel d’honoraires à la cliente.


Cassation civile 2e, 27 octobre 2022, n° 21-10739

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Notaires : recouvrement des cotisations sociales sur les salaires par l’Urssaf en 2023

Actuellement, le recouvrement des cotisations pour les risques maladie et vieillesse dues sur les rémunérations des salariés du notariat et des clercs est assuré par la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN).

Au 1er janvier 2023, le recouvrement des cotisations maladie et vieillesse, de la contribution solidarité autonomie et du complément maladie sera transféré à l’Urssaf. Cet organisme devenant ainsi l’interlocuteur unique des offices notariaux pour la déclaration et le paiement des cotisations dues sur la rémunération de leurs salariés.

Ces cotisations devront donc être déclarées via la déclaration sociale nominative et payées :
– le 5 du mois M+1 pour les offices d’au moins 50 salariés ;
– le 15 du mois M+1 pour les offices de moins de 50 salariés ou pour les offices d’au moins 50 salariés qui pratiquent le décalage de la paie.

À savoir : l’affiliation des salariés des offices notariaux ainsi que le recouvrement des cotisations sur émoluments et honoraires restent de la compétence de la CRPCEN.

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Avocats : droit au crédit d’impôt recherche

À certaines conditions, les entreprises peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt recherche (CIR) au titre des dépenses de recherche et développement (R&D) qu’elles engagent. Ce crédit d’impôt étant égal, par année civile, à 30 % des dépenses éligibles. Et parmi ces dépenses figurent les dépenses de personnel, c’est-à-dire principalement les rémunérations, et les cotisations sociales obligatoires correspondantes, des chercheurs et techniciens de recherche qui sont directement et exclusivement affectés aux opérations de R&D de l’entreprise.

Dans une affaire récente, une société d’avocats avait sollicité le bénéfice du crédit d’impôt recherche au titre de ses dépenses correspondant à la rémunération d’une salariée doctorante en droit qui procédait, au sein du cabinet, à des recherches sur les particularités de la procédure de divorce.

L’administration fiscale avait refusé d’accéder à sa demande. En effet, elle avait rappelé qu’ouvrent droit au crédit d’impôt recherche les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens directement et exclusivement affectés à la réalisation d’opérations de recherche scientifique et technique, à savoir les activités de recherche fondamentale, de recherche appliquée ou de développement expérimental. Et qu’à ses yeux, les dépenses relatives à la rémunération de cette salariée ne répondaient pas à cette définition.

Les juges ont donné raison à l’administration fiscale. Pour eux, si les recherches menées dans le domaine du droit ne sauraient, par principe, être exclues du champ d’application du crédit d’impôt recherche, celles qui sont effectuées par une salariée au sein d’une société d’avocats, et qui ont pour objet d’identifier les dispositions juridiques applicables et d’analyser une pratique juridique existante dans un domaine, ne peuvent pas ouvrir droit au bénéfice de ce crédit d’impôt.


Conseil d’État, 14 octobre 2022, n° 443869

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